Le deuil invisible : ces pertes qu'on ne reconnaît pas
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Le deuil invisible : ces pertes qu'on ne reconnaît pas

Fausse couche, séparation, départ d'un enfant... Ces pertes ne reçoivent pas toujours le statut de "vrais deuils". Pourtant, elles touchent au même noyau : perdre quelque chose qui comptait profondément.

Le deuil invisible : ces pertes qu'on ne reconnaît pas

Quand on parle de deuil, on pense souvent à la mort d'un proche. Pourtant, il existe d'autres formes de pertes, tout aussi douloureuses, mais qui restent souvent invisibles aux yeux des autres. Une fausse couche, une séparation, la perte d'un projet de vie, le départ d'un enfant devenu adulte… Ces événements ne reçoivent pas toujours le statut de "vrais deuils" dans la société. Pourtant, psychiquement, ils touchent au même noyau : celui de perdre quelque chose ou quelqu'un qui comptait profondément.

Ce que la société ne nomme pas

Le deuil invisible, c'est celui qui ne bénéficie ni de rituels, ni de reconnaissance sociale. Pas de cérémonie, pas de condoléances, parfois même pas un mot. C'est ce silence autour de la fausse couche, vécue dans l'intimité, comme si la douleur devait rester privée. C'est la rupture amoureuse, minimisée par l'entourage : "Tu en trouveras un autre." C'est le départ d'un enfant de la maison, appelé "syndrome du nid vide", souvent moqué alors qu'il peut être une véritable fracture intérieure.

Ces deuils, parce qu'ils ne sont pas nommés, laissent souvent les personnes seules avec leur peine. Et l'absence de reconnaissance vient redoubler la douleur.

Ce que la clinique nous montre

En séance, j'entends ce besoin d'avoir le droit de souffrir. Car ces pertes ne sont pas "petites". Elles mettent en jeu l'attachement, l'identité, parfois même le sentiment d'exister. Une fausse couche, par exemple, n'est pas seulement une perte biologique. C'est la perte d'un avenir imaginé, d'un lien déjà tissé en pensée, parfois d'une projection familiale. La rupture amoureuse, elle, peut réveiller un sentiment d'abandon profond, de dévalorisation, et laisser une empreinte durable.

Ces deuils invisibles créent souvent de la culpabilité : "Je ne devrais pas être aussi triste", "Ce n'est pas une vraie perte." Mais si, justement. Le corps, le cœur, la psyché, eux, savent qu'il y a eu perte.

Le travail psychique

Traverser un deuil invisible, c'est d'abord s'autoriser à le reconnaître. À dire : "Oui, ce que je vis est une perte." La psychothérapie offre un espace pour déposer cette douleur sans avoir à se justifier. Pour remettre des mots là où il n'y a pas eu de rituel, pour réhabiliter une souffrance qui a été passée sous silence.

Peu à peu, ce travail permet de transformer le lien : passer de l'absence subie à une nouvelle manière de vivre avec cette perte. Non pas en l'oubliant, mais en lui donnant une place, même discrète, dans l'histoire de vie.

En conclusion

Les deuils invisibles sont lourds à porter parce qu'ils manquent de reconnaissance. Mais ils sont réels, profonds, légitimes. Les traverser demande du temps, de la douceur, et souvent un espace où l'on peut enfin dire ce que la société tait.

Parce qu'au fond, toute perte qui blesse le cœur mérite d'être entendue.

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